13 AOÛT 2020. Babacar Touré s’en est allé pour l’éternité. Le Sénégal et l’Afrique pleurent cet homme  de média chevronné au grand cœur qui aura incontestablement marqué son époque et son milieu.  Les témoignages sont nombreux et  racontent chacun à leur manière, leur « part » de Babacar.

Une chose est sûre, Babacar « Le Mauritanien » aura été autant pleuré en Mauritanie qu’au Sénégal, lui qui comptait dans notre pays de solides relations d’amitiés  issues de toutes les communautés nationales. Ce Babacar là, c’était notre  représentant informel  au Sénégal  n’hésitant jamais à répondre favorablement aux sollicitations de natures diverses de ses amis voire de simples connaissances de Mauritanie. Son intérêt pour notre pays remonte au début des années 70 après un bref mais fructueux séjour dans l’atmosphère du bouillonnement des luttes progressistes. Depuis cette date, Babacar avait en lui une part de « mauritanité ».  Ainsi, lorsque les événements entre le Sénégal et la Mauritanie éclatèrent en 1989, il publia dans Sud Hebdo un article de haute portée intitulé « La raison du plus fou », que la nouvelle génération de journalistes gagnerait à lire pour mieux apprécier le professionnalisme de l’homme.

Babacar était aussi un précurseur. L’homme des premières fois : le premier journaliste à diriger  le CNRA, fondateur du premier quotidien privé dans son pays, de la première radio privée, de la première école privée de formation dans le domaine du journalisme et de la communication…. Certains pourraient expliquer tout cela par « sa bonne étoile ». Peut-être. Pourtant, l’homme ne recherchait point ces premières fois, elles venaient à lui, tout naturellement. La raison est simple, il était passionné par son métier, soucieux de son indépendance à tout point de vue et habité par l’inébranlable volonté de toujours mieux faire.

Babacar était également un humaniste.  Comme on dit familièrement chez  nous « j’en sais quelque chose ».  En effet, lorsque les tracas de la vie m’avaient conduit au Sénégal où j’ai vécu plusieurs années, je fus accueilli avec générosité par Babacar et son Groupe, Sud Communication.  C’est d’ailleurs eux qui m’ont mis le pied à l’étrier dans le métier de la presse écrite, moi qui venais d’une toute autre formation. Cette expérience au groupe Sud Communication aura incontestablement déterminé la suite la suite  ma carrière professionnelle. Je leur en suis profondément  reconnaissant car, comme dit un proverbe pular, « on n’oublie jamais celui qui vous a étranglé un jour ou celui qui vous a donné à manger un jour alors que vous aviez très faim ».

Difficile aussi de ne  pas évoquer  Babacar le panafricaniste, car il croyait aux capacités que recèle notre continent pour émerger et aux qualités de ses fils pour faire entendre sa voix. C’est cet état d’esprit qui l’amena en 1997 à ouvrir un bureau de Sud communication à Nouakchott pour l’édition de Sud Mauritanie. Il s’agissait d’un supplément de quatre pages inclus dans l’édition du week-end de Sud Quotidien permettant ainsi aux lecteurs de suivre l’actualité en Mauritanie et au Sénégal.

Babacar était pour moi un ami, du moins je revendique son amitié comme beaucoup de personnes qui l’ont côtoyé un jour et sont reparties heureuses d’avoir gagné un ami. Il savait mettre ses interlocuteurs en confiance et avait la capacité de tisser des relations humaines durables et de les entretenir  sans rien en attendre en retour. Mais il ne faut pas s’y méprendre, il  tenait à chacun de ses amis le langage de vérité quand il le fallait quel que soit leur rang.

Rarement, un homme aura dégagé un tel consensus dans son pays et au-delà  car Babacar était finalement  celui qui murmurait aux oreilles des riches, des pauvres, des détenteurs du pouvoir, des membres de l’opposition, des partenaires… et cela sans aucune compromission.

Qu’Allah le Tout Puissant l’accueille en son paradis et donne à ses proches la force de traverser cette épreuve difficile.

Moussa Sidi BA,

Ancien journaliste de Sud Quotidien (Sénégal)

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